Network Working Group
E. Krol Request for Comments: 1462
University of Illinois FYI: 20
E. Hoffman
Merit Network, Inc.
May 1993
Pour votre
information à propos de Qu'est-ce que l'Internet ?
Note : Ceci
est l'adaptation française du RFC 1462 FYI on "What
is the Internet?" de mai 1993. Cette traduction adaptée
par
Jean-Pierre
Kuypers <Kuypers@sri.ucl.ac.be>
est très largement tirée du livre "Le Monde
Internet Guide et Ressources", traduction par Pierre Cubaud
et Jacques Guidon du livre "The Whole Internet User's Guide
and Catalog" par Ed Krol (1992).
Statut de cette
note
Cette note est
destinée à fournir de l'information à la
communauté de l'Internet. Cette note ne spécifie en
aucune manière un standard de l'Internet. La diffusion de
cette note peut se faire sans restriction.
Résumé
Ce RFC FYI répond
à la question "Qu'est-ce que l'Internet ?" et est
produit par leUser Services Working Group de l'Internet
Engineering Task Force (IETF). Reprenant un chapitre modifié
du livre de Ed Krol "The Whole Internet User's Guide and
Catalog" (1992), l'article couvre la définition,
l'historique, la gestion, les protocoles, le financement et les
sujets d'actualité tels que la croissance, la
commercialisation et la privatisation de l'Internet.
Introduction
Une question qui
revient souvent est "Qu'est-ce que l'Internet ?" La
raison pour laquelle une telle question est si souvent posée
tient au fait qu'il n'y a pas de réponse convenue qui résume
simplement l'Internet. L'Internet peut être pensé en
termes de ces protocoles ordinaires, comme ensemble physique de
routeurs et de liaisons, comme ensemble de ressources partagées
ou même comme méthode d'interconnexion et
d'intercommunication. Certaines définitions courantes
fournies dans le passé comprenaient :
- un réseau
de réseaux basés sur les protocoles TCP/IP,
- une communauté
de personnes qui utilisent et développent ces réseaux,
- un ensemble de
ressources qui peuvent être obtenues à partir de
ces réseaux.
Aujourd'hui,
l'Internet est une ressource reliant des millions d'utilisateurs
et qui a été lancée à titre expérimental,
il y a plus de 20 ans, par le Département de la Défense
des états-Unis. Bien que les réseaux qui forment
l'Internet sont basés sur un ensemble standard de
protocoles (un mode de communication convenu mutuellement entre
parties), l'Internet possède aussi des passerelles vers des
réseaux et des services qui sont basés sur d'autres
protocoles.
Pour aider à
répondre plus complètement à la question, la
suite de cet article reprend une mise à jour adaptée
du second chapitre du livre "Le Monde Internet Guide et
Ressources", d'après la traduction par Pierre Cubaud
et Jacques Guidon du livre "The Whole Internet User's Guide
and Catalog" par Ed Krol (1992) et qui donne une explication
plus en profondeur. (L'extrait est publié ici avec
l'aimable autorisation de l'éditeur,
O'Reilly & Associates, Inc.)
L'Internet
(extrait adapté
de "Le Monde Internet Guide et Ressources")
Note : Les
paragraphes extraits du livre précité ont été
obtenus par numérisation et reconnaissance optique des
caractères. Cette opération a été
rendue possible grâce à l'aide de
Claude
Detry de la
Cellule
enseignement de l'UCL. Qu'il en soit remercié.
L'Internet est né
il y a vingt ans, à partir d'un projet de connexion du réseau
ARPAnet, du Département de Défense américain,
avec des réseaux radios ou satellites extérieurs.
ARPAnet était un réseau expérimental créé
à des fins de recherche militaire, appliquées entre
autres à l'étude de réseaux pouvant supporter
des dommages partiels (comme des bombardements) tout en restant opérationnels.
(Pensez à cette origine lorsque vous lirez la description
du fonctionnement de l'Internet; cela vous donnera une meilleure
compréhension de la logique et de la topologie de ce réseau).
Dans le modèle ARPAnet, les communications se passent
toujours entre un ordinateur source et un ordinateur destinataire.
Le réseau lui-même est considéré comme
non fiable; n'importe quel tronçon de réseau peut
devenir hors service à chaque instant. (Choisissez ici
votre catastrophe préférée il y a plus à
craindre de nos jours des gens qui se prennent les pieds dans les
câbles que de la bombe atomique). Il est conçu de façon
à ne nécessiter qu'un minimum d'informations
provenant des ordinateurs connectés. Pour envoyer un
message sur le réseau, un ordinateur doit simplement mettre
ses données dans une enveloppe, appelée paquet IP
(Internet Protocol) et fournir l'adresse de destination. Les
ordinateurs assurant la communication (et non le réseau
lui-même) doivent s'assurer que l'envoi a été
effectué. La philosophie de base est que chaque ordinateur
du réseau peut dialoguer d'égal à égal
avec n'importe quel autre ordinateur connecté.
Ces choix, comme
l'hypothèse d'un réseau non fiable, peuvent paraître
singuliers, mais l'histoire a prouvé que la plupart d'entre
eux étaient raisonnables. A partir de ces hypothèses,
les états-Unis avaient la possibilité de développer
un réseau opérationnel (l'ancêtre de
l'Internet actuel) et les utilisateurs, chercheurs ou enseignants,
qui y avaient accès devinrent rapidement enthousiastes. Les
demandes de connexion s'étendirent rapidement. Et les
utilisateurs ne pouvaient plus attendre la norme concernant les réseaux
sur laquelle l'ISO (International Standard Organization)
travaillait depuis des années. Répondant à la
demande, les développeurs portèrent leur logiciel IP
sur tous les types de machines, ces protocoles devenant la seule méthode
pratique pour communiquer entre plates-formes de divers
constructeurs. Ce protocole était particulièrement
satisfaisant dans les contextes de machines hétérogènes,
que l'on trouve souvent dans les centres de recherches et
universités, où il n'existe pas de politique d'achat
chez un fournisseur unique.
A peu près
au même moment, l'Internet prenait forme. Les technologies
de réseaux locaux de type Ethernet se développaient
lentement jusqu'en 1983, date à laquelle l'apparition des
premières stations de travail leur donna une accélération
décisive. La plupart de ces stations utilisaient UNIX
Berkeley, qui intègre les protocoles IP. Cette apparition
créa une nouvelle demande : plutôt que de connecter
un seul gros système par site, les organismes souhaitaient
pouvoir connecter leur réseau local dans son ensemble à
ARPAnet, ce qui permettait à tous les ordinateurs de ce réseau
local d'accéder aux services d'ARPAnet. Dans le même
temps, d'autres grandes sociétés ou organismes
commencèrent à construire des réseaux privés
d'entreprises à partir des mêmes classes de
protocoles. Il devint évident que si ces différents
réseaux pouvaient dialoguer entre eux, leurs utilisateurs
respectifs pourraient communiquer à leur plus grand profit.
Le plus important
de ces nouveaux réseaux fut sans doute NSFNET, financé
par la National Science Foundation (NSF), une agence
gouvernementale américaine finançant la recherche. A
la fin des années 80, la NSF créa 5 grands centres
de calcul, équipés de super-calculateurs, dans de
grandes universités réparties sur le territoire américain.
Jusque-là, ce type d'ordinateur était surtout présent
dans les laboratoires militaires ou quelques sites très
particuliers. En créant ces centres, la NSF voulait les
mettre à la portée de n'importe quel chercheur
universitaire. Seuls 5 centres furent créés pour des
raisons de coût, et devaient donc être partagés.
Cela posait un problème de communication; il fallait relier
ces centres entre eux, et permettre d'autre part aux utilisateurs
d'y accéder. Une première tentative utilisant
ARPAnet échoua, pour cause de problèmes
bureaucratiques.
En réponse
la NSF décida de construire son propre réseau,
reposant sur la technologie IP d'ARPAnet. Elle connecta les
centres avec des lignes à 56.000 bits par seconde. (Ce qui
offre la possibilité de transférer approximativement
deux pages pleines par seconde. Cela peut vous paraître lent
aujourd'hui, mais c'était considéré comme
plutôt rapide au milieu des années 80.) Il était
cependant évident que si l'on essayait de connecter chaque
université directement aux centres de calcul, on irait
droit à l'échec. Vous payez en effet ces lignes
selon leur longueur; une ligne vers un centre de calcul par
campus, un peu comme les rayons d'une roue de bicyclette vers le
moyeu, augmente considérablement la longueur totale des
lignes. Aussi fut-il décidé de mettre en place des réseaux
régionaux. Dans chaque région, les universités
étaient connectées à leur plus proche voisin.
Chaque ensemble régional était connecté à
un des centres de calcul de manière unique, les 5 centres étant
enfin reliés entre eux. Dans cette configuration chaque
ordinateur pouvait communiquer avec n'importe quel autre en
transitant par les sites voisins.
Cette solution
fut un succès, et, comme tout succès, le moment vint
où cela ne marcha plus. Partager des super-calculateurs
permet aussi aux sites connectés de partager beaucoup
d'autres ressources. D'un coup les utilisateurs avaient accès
à des masses de données et d'interlocuteurs depuis
leur station. Le trafic réseau augmenta jusqu'à la
saturation des lignes et des ordinateurs chargés du contrôle.
En 1987 un contrat pour gérer et augmenter les capacités
du réseau NSF fut attribué àMerit Network
Inc. qui exploitait le réseau universitaire de l'état
du Michigan, en partenariat avec IBM et MCI. L'ancien réseau
eut alors des lignes téléphoniques 20 fois plus
rapides, ainsi que de meilleurs ordinateurs.
L'augmentation de
la puissance des machines et du débit des voies se poursuit
encore aujourd'hui. A la différence du réseau
routier cependant, les utilisateurs ne s'aperçoivent pas de
ces changements. Vous ne verrez pas de message sur votre
ordinateur indiquant que votre tronçon de réseau
sera indisponible durant 6 mois pour cause de travaux. Peut-être
plus important est le fait que chaque cycle saturation du réseau/amélioration
des performances a donné naissance à des
technologies éprouvées. Les idées ont été
testées et lorsque des problèmes sont apparus, ils
ont été résolus.
En ce qui nous
concerne, l'aspect le plus important de l'investissement de la NSF
dans les réseaux est qu'il permet maintenant l'accès
à ces réseaux par le plus grand nombre. Avant cela,
Internet était essentiellement réservé aux
chercheurs en informatique, et aux employés d'agences
gouvernementales ou à leurs contractants. La NSF a assuré
une large promotion de ces techniques dans le monde universitaire.
La demande
continue à se développer. Maintenant que la plupart
des universités sont connectées, les projets de
connexion d'écoles, de lycées et de bibliothèques
apparaissent. Les anciens étudiants ayant eu accès
aux services de l'Internet essayent de les promouvoir au sein de
leur entreprise. Enfin, lorsque l'on bénéficie d'une
connexion au Réseau dans le cadre professionnel, le pas
suivant est de vouloir en mettre une en place à son
domicile.
Quelles sont les
composantes de l'Internet ?
C'est une
question difficile car la réponse change tout le temps. il
y a cinq ans, cette réponse aurait été : tous
les réseaux utilisant le protocole IP, qui coopèrent
pour former un seul réseau apparent pour leurs utilisateurs
respectifs. Cela inclut divers réseaux régionaux,
nationaux, d'agences gouvernementales, d'universités ou
organismes de recherche... Plus récemment, des réseaux
reposant sur d'autres protocoles d'échange ont vu l'intérêt
de l'Internet. Ils ont voulu offrir ces services à leur
clientèle. Ils ont pour cela développé des méthodes
pour connecter leurs réseaux "bizarres"
(EARN/BITNET, DECNET, etc.) au monde Internet. Au début,
ces connexions (appelées passerelles ) servaient
surtout au transfert de courrier électronique entre les
deux réseaux. Certains ont été plus loin pour
multiplier les services possibles. Font-ils partie de l'Internet ?
C'est difficile à dire, tout dépend de leur humeur.
Si tout cela vous paraît bizarre, continuez à lire - ça
devient encore plus bizarre.
Qui dirige
l'Internet ?
Par bien des
aspects, Internet est comme une église : il a son conseil
des sages, chaque membre a une opinion sur la manière dont
devraient fonctionner les choses, et chacun est libre d'en faire
partie ou pas. C'est votre propre choix. L'Internet n'a ni président,
ni directeur technique, ni Pape. Les réseaux qui le
constituent peuvent avoir des présidents ou des directeurs
généraux, mais c'est différent. Il n'y a pas
d'autorité unique pour l'Internet pris dans son ensemble.
En fait l'organe
d'orientation de l'Internet repose sur l'Internet Society,
ou ISOC. ISOC est une organisation dont les membres sont des
volontaires et dont le but est de promouvoir l'échange
d'informations à l'aide des technologies de l'Internet. (Si
vous souhaitez plus d'informations, ou si vous souhaitez en
devenir membre, voyez la partie "Organisation réseaux"
dans le Catalogue des Ressources.) Il constitue un conseil des
sages, qui a la responsabilité de la direction technique
ainsi que de l'administration de l'Internet.
Le conseil des
sages est composé d'un groupe de volontaires appelé
l'IAB (Internet Architecture Board). L'IAB se réunit régulièrement
pour "donner sa bénédiction" à des
standards et allouer des ressources, comme des adresses.
L'Internet fonctionne parce qu'il existe des manières
standardisées pour les ordinateurs et le logiciel
applicatif de dialoguer entre eux. Cela permet à de l'équipement
de différents constructeurs de communiquer sans problème.
Ce n'est pas un réseau SUN ou Macintosh uniquement. L'IAB
est responsable de ces standards; il décide quel standard
est nécessaire et ce qu'il devrait être. Lorsqu'un
standard est nécessaire, il examine le problème,
adopte un choix et l'annonce à travers le Réseau.
(Vous vous attendiez à des tablettes gravées ?)
L'IAB gère aussi des tables de divers types qui doivent être
uniques. Par exemple, chaque ordinateur connecté à
l'Internet a une adresse sur 32 bits qui est unique. Aucun autre
ordinateur ne peut avoir la même adresse. Comment cette
adresse doit-elle être assignée ? L'IAB se préoccupe
de ce type de problèmes. Il n'attribue pas les adresses,
mais édicte les règles de délivrance.
Comme dans une église,
chacun a son opinion sur le fonctionnement des choses. Les
utilisateurs de l'Internet peuvent exprimer leur opinion au
travers des réunions de l'IETF (Internet Engineering Task
Force). L'IETF est une autre organisation de volontaires; elle se
réunit régulièrement pour discuter de problèmes
techniques ou opérationnels de l'Internet. Lorsque apparaît
un problème qui semble important, l'IETF peut mettre en
place un groupe de travail pour l'analyser. (En pratique, un problème
important signifie en général qu'il se trouve
suffisamment de volontaires pour faire partie du groupe de
travail). Chacun peut assister aux réunions de l'IETF et
faire partie des groupes de travail. Les groupes de travail
peuvent avoir des préoccupations très différentes,
allant de la production de documentation à la coopération
entre réseaux en passant par le changement de la
signification de tel bit dans un paquet IP. Un groupe de travail
produit généralement un rapport. Selon la nature de
la recommandation, ce rapport peut consister seulement en une
documentation délivrée à qui en fait la
demande, en une idée que les utilisateurs appliquent si
elle semble bonne, ou enfin en une demande de standardisation
adressée à l'IAB.
Si vous entrez
dans une église et acceptez sa philosophie et ses
enseignements, vous êtes en retour accepté par elle
et en recevez les bénéfices. Si, au contraire, vous
ne l'appréciez pas, vous pouvez la quitter. L'église
continue à fonctionner mais vous n'en profitez plus.
L'Internet fonctionne de cette manière. Si un réseau
accepte les règles de l'Internet, s'y connecte et estime en
faire partie, alors il est partie constituante de l'Internet. Il y
trouvera parfois des choses qu'il n'apprécie pas et pourra
adresser ses remarques à l'IETF. Certaines de ces remarques
pourront être reconnues valides et l'Internet pourra évoluer
dans ce sens, d'autres risquent d'être en contradiction avec
le "dogme" et seront rejetées. Si enfin le réseau
provoque par ses actions des dommages à l'Internet, il
pourra être excommunié jusqu'à ce qu'il fasse
amende honorable.
Qui paye ?
La règle
habituelle, lorsque les choses ne sont pas claires, est de se
demander: "D'où vient l'argent?" Mais ça
ne marche pas ici. Personne ne paye pour "l'Internet";
il n'y a pas de société commerciale Internet Inc.
qui collecterait des fonds des divers réseaux ou des
utilisateurs. Au contraire chacun paye sa part. La NSF paye pour
NSFNET. La NASA paye pour le réseau NASA Science
Internet . Les réseaux décident de se connecter
et règlent les problèmes de financement de ces
interconnexions. Une université ou une société
privée paye pour sa connexion à un fournisseur de
services, qui lui-même paye sa connexion à un réseau
national ou international.
Il y a un mythe
de l'Internet gratuit. Ce n'est pas gratuit; quelqu'un paye pour
chaque connexion à l'Internet. Très souvent en effet
ces coûts ne sont pas connus de l'utilisateur final, ce qui
alimente l'illusion de l'accès gratuit. Mais il y a également
beaucoup d'utilisateurs qui savent très bien que c'est
faux, car ils payent systématiquement les montants horaires
ou mensuels de leurs connexions à des vitesses jusqu'à
64 kb par seconde une vitesse équivalente à celles
des lignes NSF de la première génération!).
Aujourd'hui les domaines de plus forte croissance de l'Internet
correspondent à ceux des PME-PMI et des individuels, et ces
utilisateurs sont très au fait des prix à payer.
Qu'est-ce que
cela implique pour vous ?
Le fait que
l'Internet ne soit pas un seul réseau, mais un ensemble de
réseaux n'a pas grande signification pour l'utilisateur
final. Ce que vous voulez, c'est faire quelque chose d'utile:
lancer un programme, accéder à des données
importantes ou uniques. Vous n'avez pas à vous soucier de
comment tout cela est relié. Considérez le système
téléphonique - c'est aussi un Internet en quelque
sorte. Pacific Bell, ATT, MCI, British Telecom, France Télécom,
etc. sont des sociétés différentes qui opèrent
chacune sur une partie du réseau téléphonique.
Elles se préoccupent de la manière d'inter-opérer;
tout ce que vous avez à faire est de composer votre numéro.
Et si vous ne vous préoccupez pas du coût ou des
aspects commerciaux, vous n'avez pas à vous soucier de l'opérateur
qui est derrière, mais juste à composer le numéro
de votre correspondant, et ça marche.
Vous ne vous
occupez de votre opérateur que lorsqu'il y a problème.
Si un central s'arrête, c'est à la compagnie propriétaire
de ce central de le réparer. Les différentes
compagnies téléphoniques peuvent mener des opérations
en commun mais chacun est responsable du bon fonctionnement de sa
partie du système. La chose est également vraie dans
l'Internet. Chaque réseau a son centre opérationnel.
Les différents centres peuvent communiquer pour résoudre
des problèmes ou améliorer le service. Mais vous
avez un contrat avec l'un de ces opérateurs dont le rôle
est de vous fournir un bon service.
Quel devenir
pour l'Internet ?
Enfin, une
question à laquelle je peux répondre. Ce n'est pas
que j'aie une boule de cristal (si j'en avais une, je crois que je
passerais mon temps à Wall Street plutôt que d'écrire
ce livre), mais on en parle beaucoup aux réunions de l'IAB
et de l'IETF. La plupart des gens ne s'intéressent pas trop
à ces longues discussions, ne voulant savoir que ce qui les
touchera directement. Voici donc les points marquants concernant
le futur du Réseau.
Nouveaux
protocoles standard
Lorsque j'évoquais
les débuts de l'Internet, j'ai mentionné l'ISO et
leur suite de protocoles standard. Ils ont fini par les définir.
C'est maintenant une norme internationale connue sous le nom de
suite de protocoles OSI (Open Systems Interconnection -
Interconnexion de Systèmes Ouverts) de l'ISO. Beaucoup d'opérateurs
Internet proposent ces protocoles aujourd'hui. Ils sont cependant
peu demandés. Certains gouvernements souhaitent que leurs
ordinateurs puissent gérer ces protocoles. Beaucoup ont le
logiciel nécessaire mais peu s'en servent réellement.
Il n'est pas évident
de connaître l'évolution de la demande vers OSI,
malgré ces exigences gouvernementales. Nombreux sont ceux
qui pensent que l'approche actuelle fonctionne et ne mérite
pas d'être changée. Ils commencent à bien
savoir utiliser les protocoles actuels. Pourquoi apprendre une
nouvelle terminologie et de nouvelles commandes, uniquement parce
que cela correspond à une norme ?
Actuellement il
n'y a pas d'avantage réel à migrer vers OSI.
L'ensemble est plus complexe et moins mûr que IP, et donc ne
fonctionne pas aussi bien. OSI offre l'espoir de nouvelles
fonctions, mais souffre des mêmes problèmes qui gêneront
IP quand le Réseau atteindra une taille et des vitesses
trop importantes. il est clair qu'un certain nombre de sites
migreront vers OSI dans les prochaines années. La question
est : combien ?
Connexions
internationales
L'Internet est
depuis déjà assez longtemps un réseau
international, mais qui s'étendait surtout vers les pays
alliés des états-Unis et les bases outre-mer.
Maintenant, dans un environnement mondial moins paranoïaque,
Internet s'étend partout. Il concerne déjà
plus de 60 pays et ce nombre croît rapidement. Les anciens
pays de l'Europe de l'Est ayant des collaborations scientifiques
avec l'Ouest souhaitaient depuis longtemps s'y raccrocher, mais ne
le pouvaient pas du fait d'interdictions gouvernementales.
Maintenant que le "rideau de fer" a disparu, ils sont
bien représentés. Et les pays en voie de développement
qui n'avaient pas jusqu'ici les moyens d'y participer, voient
maintenant l'Internet comme un moyen d'accroître leurs
niveaux technologiques et éducatifs.
En Europe, le développement
de l'Internet a été gêné par
l'existence de réglementations imposant les protocoles OSI,
par opposition à IP d'origine américaine. En dehors
de la Scandinavie où les protocoles IP ont été
adoptés depuis longtemps, ces réglementations ont
limité le développement de l'Internet sur une large échelle.
En 1989, RIPE (Réseaux IP Européens) a commencé
à coordonner l'Internet en Europe; aujourd'hui, environ 25
% de tous les systèmes connectés à l'Internet
se trouvent en Europe.
A présent,
c'est le manque d'une bonne infrastructure de support, et en
particulier un bon réseau téléphonique, qui
freine le plus le développement international de
l'Internet. Tant en Europe de l'Est que dans le tiers-monde, le réseau
téléphonique est déficient. Même dans
les grandes villes, les vitesses sont limitées à
celles disponibles dans n'importe quel foyer américain, à
savoir 9600 bits par seconde. Et typiquement, même si un de
ces pays est "sur l'Internet", seuls quelques rares
sites sont accessibles. Généralement, c'est la
grande Université du lieu. Cependant comme le réseau
téléphonique s'améliore dans certains
endroits, on peut espérer voir de plus en plus de sites
connectés.
Usages
commerciaux
De nombreuses
grandes entreprises sont sur l'Internet depuis des années.
Pour la plupart d'entre elles, cela ne concernait que leur département
Recherche et Développement. Ces mêmes entreprises
utilisaient d'autres réseaux (en général privés)
pour leurs communications commerciales. Après tout, ce
machin IP n'était qu'un jouet pour universitaires. Les
grands ordinateurs IBM qui traitaient leurs problèmes de
gestion utilisaient un "vrai" réseau, basé
sur une suite de protocoles appelée System Network
Architecture (SNA).
On découvre
maintenant dans ce monde que maintenir plusieurs réseaux coûte
cher. Certains commencent à regarder vers Internet pour
n'avoir plus qu'un seul réseau à gérer. La
plupart des règles qui excluaient ou restreignaient un
usage commercial du Réseau ont disparu. Maintenant ces
grandes entreprises peuvent utiliser l'outil Internet pour répondre
à tous leurs besoins.
Tout cela sera
surtout utile pour les PME-PMI. Une multinationale peut supporter
la charge de gérer son propre réseau pour relier ses
sites. Une petite entreprise ne peut le faire. Pour une petite
société ayant deux localisations distantes, il
suffit d'une connexion Internet en chaque lieu.
Privatisation
Après
l'ouverture aux usages commerciaux, arrive la privatisation.
Depuis des années aux états-Unis, la communauté
réseau a souhaité voir les opérateurs de télécommunications
et autres sociétés commerciales fournir des accès
Internet. De cette manière, de même que vous
commandez un abonnement téléphonique, vous pourriez
commander un accès Internet. Vous commandez, l'installateur
vient et connecte votre ordinateur à la prise. Exception
faite de BBN (Bolt, Beranek & Newman, la société
qui réalisait ARPAnet), il n'y eut aucun candidat. Les
compagnies téléphoniques disaient en substance "nous
vous vendons les lignes de téléphone, vous faites ce
que vous voulez avec". Aussi, par obligation, le gouvernement
fédéral continuait sa politique interventionniste.
Maintenant que
l'usage de l'Internet intéresse les grandes entreprises,
les compagnies de téléphone ont changé
quelque peu d'attitude. Elles se plaignent au contraire que le
gouvernement souhaite les laisser en dehors de ce marché.
Après tout, qui, mieux que les opérateurs de télécommunications,
peut fournir des services réseaux? Elles ont convaincu de
nombreux responsables politiques à qui la demande a semblé
raisonnable. Si vous parlez au personnel de ces compagnies, la
plupart d'entre eux ne comprennent pas grand chose à
l'Internet. Ils ne sont pas encore croyants, mais étudient
la Bible de toutes leurs forces. (Mes excuses aux employés
de ces compagnies qui eurent la révélation il y a
des années et qui ont essayé de convaincre leurs
employeurs d'entrer en religion.)
Depuis le
discours sur l'infrastructure nationale d'information par le
gouvernement américain actuel, d'autres acteurs sont
apparus. Les compagnies de télévision par câble
ont réalisé qu'elles avaient elles aussi un réseau
conséquent capable de transporter des données numériques.
Ce réseau atteint déjà de nombreux foyers américains.
Elles ont donc proposé de résoudre le problème
de la privatisation, en créant leur propre réseau
sans aide gouvernementale. Ce réseau offrirait un très
bon retour sur l'investissement consenti pour la télévision
câblée. Il reste à voir ce qui sortira de
cette initiative; ils ont déjà la religion (et
l'argent à investir), mais ils écriront peut-être
leur propre version de la Bible. Il est clair que les compagnies
de télévision par câble sont intéressées
par des applications qui n'existent pas sur l'Internet
aujourd'hui: télé-achat, jeux vidéos, etc....
Il est moins certain qu'elles connaissent bien les usages plus
traditionnels de transfert de données et qu'elles
comprennent aussi que le réseau ne peut s'arrêter à
chaque fois qu'un orage survient.
Bien que beaucoup
de gens du monde des réseaux pensent que la privatisation
de l'Internet est une bonne idée, quelques obstacles
demeurent. La plupart ont trait aux subventions pour les liaisons
déjà en place. De nombreuses écoles et
universités sont connectées parce que l'état
paye la facture. Si elles avaient à la payer, nombreuses
sont celles qui consacreraient leurs fonds à d'autres
activités. Si les grands centres de recherche
continueraient certainement, il n'en serait pas de même pour
les petites universités (sans parler des écoles).
Que faire quand il faut choisir entre une connexion à
l'Internet et un nouveau laboratoire ? L'Internet n'apparaît
pas encore comme une "nécessité" dans
l'esprit de nombreuses personnes. Quand ce sera le cas, la
privatisation viendra vite.
Nous sommes en
train de passer rapidement d'une époque où le réseau
était un projet en lui-même, à une nouvelle période
où le réseau est un outil à utiliser et à
intégrer dans d'autres projets. Cela change la manière
qu'a le gouvernement de distribuer les fonds consacrés aux
réseaux. Aussi, plutôt que de subventionner le réseau
d'un campus ou d'un organisme, la subvention est surtout attribuée
à des projets. Les équipes développant ces
projets peuvent acheter leurs services Internet à l'extérieur
auprès d'un opérateur. Cela inquiète un
certain nombre de gens car c'est une menace pour d'autres
financements. D'un autre côté, c'est sans doute la
seule manière pratique de voir l'argent public et l'argent
privé se combiner pour atteindre une masse suffisante
permettant d'étendre l'Internet vers les endroits les plus
reculés.
Bien, assez parlé
de l'histoire de l'autoroute de l'information. Il est temps de
prendre la route.
Remerciements
Nous tenons à
remercier O'Reilly &
Associates pour la permission de reproduire le chapitre du
livre de Ed Krol "The Whole Internet User's Guide and Catalog"
(1992).
[NdT] Nous
remercions l'éditeur,
O'Reilly &
Associates, Inc. pour son aimable autorisation de reproduire
le chapitre du livre "Le Monde Internet Guide et Ressources".
Pour plus
d'information
- Hoffman, E.
and L. Jackson. (1993) "FYI on Introducing the Internet --A
Short Bibliography of Introductory Internetworking Readings for
the Network Novice," 4 p. (FYI 19,
RFC 1463).
- Pour découvrir
comment obtenir ce document et d'autres lectures introductives
en ligne, câblez à <nis-info@nis.merit.edu>,
avec simplement le texte send access.guide.
- Krol, Ed.
(1992) The Whole Internet User's Guide and Catalog, O'Reilly &
Associates, Sebastopol, CA. ISBN 1-56592-025-2.
- Quarterman, J.
(1993) "Recent Internet Books," 15 p. (RFC
1432).
- The Internet
Society
Phone: (703)
620-8990
Fax: (703)
620-0913
E-mail: <isoc@cnri.reston.va.us>
Considérations
relatives à la sécurité
Les questions de
sécurité ne sont pas discutées dans cette
note.
Adresse des
auteurs
Ed Krol
Computing and
Communications Service Office
Univ. of
Illinois Urbana Champaign (UIUC)
1304 W
Springfield
Urbana, IL
61801
Phone:
(217)333-7886
EMail: <e-krol@uiuc.edu>
Ellen Hoffman
Merit Network,
Inc.
2901 Hubbard,
Pod-G
Ann Arbor, MI
48105
Phone: (313)
936-3000
EMail: <ellen@merit.edu>
29 janvier 1997.
Responsable
:
Jean-Pierre
Kuypers <Kuypers@sri.ucl.ac.be> |